Rassurer et restaurer la confiance : de la transparence à la sincérité
Par Éric Birlouez, ingénieur agronome et sociologue de l’agriculture et de l’alimentation.
« Une des caractéristiques majeures du rapport que nos concitoyens entretiennent avec la nourriture réside dans la montée des inquiétudes alimentaires. »
De la sincérité en plus de la transparence
Nombreux sont les consommateurs qui éprouvent le besoin d’être rassurés et qui souhaitent reprendre le contrôle sur leur alimentation. Ce besoin et ce désir profonds expliquent en partie l’apparition ou l’essor de certaines pratiques comme celle du « fait soi-même » (cuisine, mini-potagers…), l’achat de produits bio et/ou locaux, ou encore l’utilisation d’applications. La volonté de consommer « responsable et solidaire » conduit également certains mangeurs à privilégier des laits (ou d’autres aliments) estampillés « équitables ».
La quête de réassurance et de confiance se traduit aussi par une exigence croissante de traçabilité et, plus largement, de transparence. Ce « besoin de savoir », exprimé par 91 % des Français, porte en priorité sur la nature (56 %) et l’origine géographique (61 %) des ingrédients (TNS-Kantar, Food 360, 2018). Nos concitoyens recherchent surtout des informations simples, claires et immédiates (d’où le succès de certaines applications en ligne).
En revanche, les mangeurs se posent des questions, et ils souhaitent qu’on leur apporte des réponses honnêtes. C’est pourquoi au terme de transparence, nous préférons celui de sincérité. Les Français réclament avant tout des discours de vérité : en réponse à leurs interrogations, ils exigent que l’entreprise ou la filière dise la vérité, affiche ce qu’elle fait et fasse ce qu’elle dit. Ils apprécient les entreprises qui reconnaissent ne pas être parfaites mais qui s’engagent concrètement à mieux répondre aux attentes des citoyens-consommateurs.
Communiquer… pour donner envie
Lorsqu’il apparaît dans la langue française au XIIIe siècle, le mot communiquer possède un double sens: « mettre en commun » et « entrer en relation avec ». L’étymologie nous rappelle que la communication n’est ni la publicité, ni même l’information ou la pédagogie (au sens de « faire passer un message »). La véritable communication est proactive et positive : elle cherche à donner envie. Elle vise à (re)nouer des liens humains (« entrer en relation »), à susciter un dialogue apaisé. Une « mise en commun » qui doit commencer par une véritable écoute des consommateurs pour prendre connaissance de leurs représentations, interrogations et points de vue, pour essayer de comprendre leurs critiques et leurs inquiétudes. Viendra ensuite le temps des « explications », des arguments, des réponses aux questions.
La proximité pour expliquer
La forme la plus efficace (outre la présence sur Internet et les réseaux sociaux) est celle de la communication de proximité, une proximité à la fois géographique et humaine. C’est celle que met en œuvre Syndilait lorsqu’il propose, lors de la Journée Mondiale du Lait, des visites d’usines et d’élevages laitiers. Cette initiative permet de « prouver le discours » en donnant à voir les réalités concrètes et actuelles des élevages et des sites industriels, au-delà des clichés, des préjugés et des fantasmes. Par ailleurs, les meilleurs ambassadeurs du lait sont les éleveurs et les salariés des laiteries. La dimension humaine et émotionnelle est essentielle : la montée des inquiétudes et de la défiance s’explique en partie par la déshumanisation de la filière alimentaire. Enfin, les consommateurs sont avides « d’expériences » inédites : les portes ouvertes répondent « à cette attente et à l’envie d’apprendre, de comprendre et de recréer des liens. »
Eric Birlouez,
ingénieur agronome
et sociologue de l’agriculture et de l’alimentation.